TECHNIQUE A BORD

Contamination bactérienne des réservoirs de gazole

La contamination d’un réservoir de gazole par l’apparition de bactéries, levures, moisissures se caractérise par la formation de boues plus ou moins filandreuses venant colmater le préfiltre du circuit de gazole et perturbant le fonctionnement du moteur. Parfois on observe également, ce fut notre cas, la formation d’une mère (masse gélatineuse) qui peut venir obturer partiellement ou totalement le tube plongeur d’aspiration de gazole.

Dans la situation d’origine, sur le réservoir en plastique du Sun Odissey 35, l’extrémité du tube plongeur d’aspiration de gazole est munie d’une crépine (petite capote en grillage inox très fin emboîtée sur le bout du tube plongeur).
En présence d’une mère qui se forme dans le réservoir, celle-ci est aspirée en même temps que le gazole et vient se plaquer contre la crépine limitant la circulation du gazole (schéma 1). Le moteur ralentit, ce qui fait que la pompe d’alimentation en gazole ralentit également et en ralentissant la pompe d’aspiration de gazole perd en partie sa capacité d’aspiration, la mère se détache de la crépine, le débit de gazole augmente et le moteur accélère; l’aspiration de gazole augmentant, la mère vient à nouveau se plaquer sur la crépine et le cycle décélération-accélération du moteur se répète.
Enlever la crépine n’est pas la solution, car la mère va venir se plaquer sur l’orifice du tuyau d’aspiration et bloquer le passage de gazole (schéma 2): le moteur cale.
Solution envisagée (schéma 3): réaliser, à partir d’un grillage inox à maille fine, une crépine de grande longueur, de gros diamètre
(compatible avec la dimension du trou de passage du tube plongeur d’aspiration) de façon que la mère ne puisse plus réduire le débit de gazole quand elle vient se plaquer sur la crépine. Ainsi la mère ne peut plus produire de ralentissement du moteur.
Evidemment cela ne règle pas le problème de la pollution du gazole dans le réservoir; si l’on s’aperçoit que le préfiltre commence à se colmater par la présence de boues, une inspection du réservoir peut s’avérer nécessaire. Pour cela on doit procéder à la vidange du réservoir au moyen par exemple d’une pompe entraînée par une visseuse (ex.Wolfcraft); on utilisera des tuyaux« cristal » qui permettent de voir si le gazole pompé véhicule des impuretés.

Le réservoir en polyéthylène du S035 ne contient pas de compartiment à l’intérieur ; après l’avoir vidé et démonté, on inspecte les résidus; on peut observer assez bien par l’orifice de remplissage l’état des parois et le fond du réservoir en éclairant l’intérieur par le trou du tube plongeur.
S’il apparait des résidus collés au fond et sur les parois à l’intérieur du réservoir, un décapage est nécessaire ; on pourra par exemple introduire un détergent et une longueur de chaîne, agiter énergiquement le réservoir, vider, recommencer jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de résidus de polluant qui apparaisse, puis rincer au Karcher et sécher.


Voici quelques idées, remarques, recueillies auprès de professionnels qui traitent couramment ces problèmes de contamination des réservoirs de gazole.

1-    Dans certaines configurations de réservoir une trappe de visite suffisamment dimensionnée serait utile ; elle permettrait d’inspecter au moins partiellement le fond du réservoir et aussi d’extraire la mère qui aurait pu se former dans le réservoir sans avoir à démonter le réservoir pour procéder à son nettoyage.
2-    Lorsqu’à l’origine on a fait le plein avec un gazole propre, il est reconnu que la contamination du gazole se produit principalement par la présence d’eau dans le réservoir ; les boues, moisissures, bactéries se forment à l’interface eau-gazole. Cette eau provient de l’effet de condensation de la vapeur d’eau contenue dans l’air au contact des parois; avec les variations de température, par l’évent, le réservoir« respire» et petit à petit l’eau s’accumule en bas du réservoir. Veiller le plus souvent possible à maintenir son réservoir plein de carburant contribue à limiter ce phénomène de condensation.
3-    l’introduction de produit antibactérien au moment du remplissage n’est pas une assurance tout risque même si c’est recommandé ; si on a recours à ces produits, bien respecter les doses indiquées ; un excès de produit antibactérien peut conduire à la formation d’une glue tenace dangereuse pour le circuit d’alimentation du moteur.
4-    Quand on est amené à démonter le tube plongeur, il faut au remontage faire l’étanchéité de la bride avec une pâte résistant au gazole par exemple la Spatex (on en trouve notamment chez Sofomarin, 52 rue de la Trinquette à La Rochelle mais ailleurs aussi), à moins qu’il existe un joint d’étanchéité en élastomère, mais ça n’est pas toujours le cas.

Pour plus d’information, certains sites internet traitent de ce problème de contamination des réservoirs mais il ne faut pas prendre pour argent comptant tout ce qui se dit dans les forums …… .

F. Peltier – S035 -Santa Fe

Je valide totalement le travail réalisé par notre ami François, tout en apportant mon expérience personnelle sur ce sujet.

Sur le « Stéphadian » un Chassiron CF, j’ai eu cette panne une fois en 39 ans, mais avec plusieurs alertes.

D’origine, il y a une sortie de gasoil presque en bas du réservoir et sans démontage possible. Il existait une autre sortie par tube plongeur non utilisée, c’est celle ci qui a permis de doubler le circuit entre le réservoir et le premier filtre

Par un jeu de vannes, ce tube est mis en service uniquement en cas de problèmes.

Ce phénomène de « mère » dans le gasoil faisant comme une soupape sur l’aspiration du carburant est très commun, cause de déclenchement de beaucoup d’interventions de secours en mer, l’anticiper est réellement une sécurité.

François signale aussi en cas de panne en mer la possibilité d’alimenter le moteur directement avec un tuyau et un filtre ( éventuellement celui du moteur qui ne devrait pas être colmaté) soit à partir d’un bidon ou par l’orifice de remplissage du réservoir.

Un bout de durite bien adapté peu vous sauver ou tout au moins faire baisser les statistiques des secours dont se servent les assureurs.

Alain ROBERT